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Publié par andika

Après une Neuvième de Mahler mémorable fin 2022 à la Philharmonie de Paris, Myung-Whun Chung était de nouveau à la tête de son cher Orchestre Philharmonique de Radio France le 17 mars dernier, à l'auditorium de la Maison de la Radio et de la musique pour un programme mêlant Messiaen et Bruckner. Pour Messiaen, la sublime Ascension, quatre méditations symphoniques pour orchestre. Pour Bruckner, la lumineuse Symphonie n°7 en mi majeur. L'élévation vers le ciel, pour Messiaen, fervent chrétien. La célébration de Wagner dans la 7ème Symphonie de Bruckner, lui aussi chrétien fervent.

Myung-Whun Chung en répétitions (© Radio France)

Myung-Whun Chung en répétitions (© Radio France)

Le chef Myung-Whun Chung confesse souvent commencer ses concerts par des œuvres de Messiaen car il trouve de l'apaisement dans cette musique. Apaisement absolument pas superflu en cette période et il est d'ailleurs agréable de constater que l'Orchestre Philharmonique de Radio France revisite Messiaen cette saison. L'Ascension est l'œuvre la plus importante du jeune Messiaen. Composée entre 1932 et 1933, elle s'inspire une fois de plus des Écritures, où Messiean, le catholique fervent, trouve son inspiration. L'Ascension de Jésus vers son Père mais aussi de la gamme du mi vers le sol. La première méditation, Majesté du Christ demandant sa gloire à son Père est une fanfare de cuivre douce, équilibrée et céleste. Chaque silence sonne, le chef prenant son temps dans un tempo large, donnant à l'ensemble la solennité d'un véritable prière. La deuxième méditation, Alléluias sereins d'une âme qui désire le ciel, permet l'entrée des cordes qui jouent dans un registre aigu, et accompagnent les bois, notamment le cor anglais, dans une suite de couplets et de refrain saisissante. Alléluia sur la trompette, alléluia sur la cymbale, troisième méditation est ici, un véritable scherzo. « Le Seigneur est monté au son de la trompette...Nations, frappez toutes des mains; célébrez Dieu par des cris d'allégresse » (Psaume 46). Au milieu de cette allégresse du Psaume, le chef trouve un équilibre merveilleux entre les trompettes joueuses et lumineuses, et le tutti de l'orchestre enfin employé ici au maximum de ses capacités. Au niveau du rythme, c'est l'émerveillement, entre le premier thème aux trompettes dans une mesure à 3/4, et le deuxième motif aux cors puis repris à l'orchestre dans une mesure 2/4. L'ensemble est dynamique et bondissant, et dénote une fervente vivacité. Enfin, la dernière méditation, Prière du Christ montant vers son père, est dévolue uniquement aux cordes, très transparentes. Une élévation solennelle d'un parfait dépouillement harmonique et d'une admirable lenteur, pour un début de concert apaisant, comme l'affectionne Myung-Whun Chung.

"D'abord curiosité, ensuite intérêt, puis admiration, enfin enthousiasme, telle fut la gradation." Ainsi fut-il rendu compte de la Symphonie n°7 de Bruckner lors de sa création en 1884 à Leipzig. L'idée d'ascension jalonne également cette partition qui devient de plus en plus irrésistible au fur et à mesure qu'on avance dans son écoute. Il s'agit de l'œuvre la plus célèbre du compositeur, et son succès ne s'est jamais démenti. Le premier mouvement, noté Allegro moderato commence par un trémolo aux cordes suivi du thème exposé aux cors. Arpège sur l'accord de mi majeur affirmant la tonalité avec amplitude et plénitude. Chung trouve ici un équilibre fabuleux des plans sonores. Avec des vents lumineux et une douceur dans le tutti, sertie d'une justesse constante dans les nuances. Cette tendance se confirme dans le deuxième thème pris plus lentement avant un fabuleux accelerando préparant le troisième thème et le retour du tempo initial, légèrement accéléré. Chung emploie chaque outil de la partition pour en révéler la profonde richesse. Notamment dans le développement, nerveux, vivant, au riche matériel thématique toujours bien mis en valeur au sein des différents pupitres, riches en contrechant. Le deuxième mouvement, célèbre Adagio hommage à Wagner, se distingue ici par un cantabile délicieux. Le phrasé de l'Orchestre Philharmonique de Radio France est limpide, et les nuance merveilleuses, même lorsque les timbres graves jouent fortissimo, ou au contraire, lorsque la nuance piano instaure le calme. Les attaques sont franches, et malgré le côté élégiaque de ce mouvement, il est joué sans trop de vibrato par les cordes. L'intensité augmente dans le Scherzo pris sur un tempo assez tranquille mais dont le caractère épique n'est pas démenti. La science du rythme du chef s'exprime et on peut goûter à chacun de ceux exprimés par Bruckner avec délectation. Les attaques sont sèches, les crescendos bien construits et le volume sonore s'en vas croissant sur des notes qui bondissent littéralement de l'orchestre. Les contrastes dynamiques sont saisissants et font d'autant plus ressortir le fracas qui se dégage de cette musique avant que le Finale joyeux ne débute. L'élévation vers la lumière, aidée par une petite harmonie fabuleuse et des cuivres exceptionnels. Dans ce mouvement de forme sonate, le développement et les modulations qui y sont exposées sont mordantes, et les idées foisonnent, pour aboutir effectivement à l'enthousiasme, quand le premier thème du premier mouvement fait son retour triomphal.

Un concert de grande qualité, qu'on termine avec l'esprit léger et élevé.

Concert diffusé le 31 mars 2023 sur France Musique à 20h

Programme du concert du 17 mars 2023 à Radio France
OLIVIER MESSIAEN
L’Ascension

ANTON BRUCKNER
Symphonie n° 7 en mi majeur

ORCHESTRE PHILHARMONIQUE DE RADIO FRANCE
MYUNG-WHUN CHUNG
 direction

 

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