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Publié par andika

Le National la veille proposait déjà un programme Tchaikovski/Chostakovitch mais comme on ne se lasse pas de ces deux compositeurs russes, il était évident de rempiler, en ce Vendredi 24 septembre 2021 à la Maison de la radio et de la musique, avec eux. Mais exit l'Orchestre National de France et place à l'Orchestre Philharmonique de Radio France, sous la direction de Mikko Franck, avec la violoncelliste Sol Gabetta pour interpréter le Concerto pour violoncelle n°2 du de Chostakovitch (la veille de son anniversaire). Puis, la célèbre Symphonie Pathétique de Tchaïkovski. Mais avant cela, et comme souvent dans les programmes du Philhar', une œuvre plus intimiste, à savoir Light and Darkness de Sofia Goubaïdoulina. Pièce pour orgue, inteprétée par l'organiste Lucile Dollat.

 

Poster du concert

Sofia Goubaïdoulina a eu comme professeur Nikolaï Peiko au conservatoire de Moscou, l'assistant de Chostakovitch. Et comme son aîné, elle a été confronté à des problèmes face au régime soviétique, notamment à cause de l'arrivée au pouvoir de Brejnev. D'une part en raison de sa musique, pas tellement dans les canons du réalisme socialiste, mais aussi probablement à cause de sa foi chrétienne qui était mal vue au sein du régime communiste. Light and Darkness a été composé en 1976, un an après la mort de Chostakovitch. Partition sans barre de mesure, ni d'indication métronomique, elle laisse une grande latitude à l'interprète. Et Lucile Dollat ne semble pas perdue devant la console de l'orgue qui surplombe les chœurs et la scène de l'auditorium. On déplorera cependant de la voir seulement de dos pendant qu'elle joue et malheureusement, elle n'a pas mis le pied sur la scène, de sorte que l'on ne l'a pas bien vue. Cependant, on l'a entendue, et très bien ! Quels bons choix de registrations privilégiant le chant. Dans un auditorium presque entièrement plongé dans le noir, on entre en vibration avec cette musique, faite d'arpèges, de grande virtuosité et qui exploite bien les capacités du bel orgue de la maison de la radio et de la musique.

Le Concerto pour violoncelle n°2 de Dmitri Chostakovitch est définitivement moins trivial et drôle que le premier. Ecrit pour grand orchestre, il emploie pourtant peu le tutti. Composée à l'occasion des 60 ans du compositeur, cette partition est d'une richesse rare et d'une grande sophistication dans l'écriture. Le concerto s'ouvre par une phrase grave et méditative au violoncelle solo dans le premier mouvement noté Largo. Le jeu de Sol Gabetta est doux et bien phrasé, tout en simplicité et en subtilité. L'orchestre n'est pas en reste  avec des bois et cuivres très acides. Le deuxième mouvement noté Allegretto est un peu plus drôle et léger, le dialogue entre la petite harmonie et la soliste est plaisant, et comme dit précédemment, peu de tutti. Les différents pupitres de l'orchestre alternent avec brio, Mikko Franck dirigeant avec précision, notamment les cors qui amènent la transition vers le troisième et dernier mouvement encore noté Allegretto ! Ici, la riche section de percussions s'exprime pleinement avec entrain et humour. Et on apprécie une fois de plus l'expressivité de Sol Gabetta, surtout sur la longue note grave au violoncelle, sur fond de xylophone, qui ponctue la partition. Et que dire de ce bis, joué sans archet, entièrement en pizzicato. Le Caprice n°5 du méconnu Joseph Marie Clément Dall'Abaco remis ainsi au goût du jour par Sol Gabetta !

Enfin, pour conclure, un monument, un tube, une oeuvre connue de tous, à savoir la Symphonie Pathétique de Tchaïkovski. Créée simplement neuf jours avant la mort du compositeur en 1893, elle est encore reçue aujourd'hui comme son testament. Opus fréquemment revisité par le Philhar', notamment il y a deux ans avec Myung-Whun Chung. Mais cette fois-ci, place à Mikko Franck. Et on sent déjà des différences. Là où le chef coréen était rude et revêche, Mikko Franck adopte sa démarche habituelle avec un son rond et léger, cependant, sans jamais tomber dans la guimauve que rend possible cette partition élégiaque. Le premier mouvement noté Adagio-Allegro ma non troppo commence ainsi paisiblement avec énormément de clarté aux pupitres de cordes, rondement mené par le premier violon solo, Hélène Collerette dans la partie lente. La partie rapide du premier mouvement est très équilibrée malgré son intensité, les cuivres ne débordent pas et sont contenus tout en étant très sonores. La valse à cinq temps du deuxième mouvement offre une respiration bienvenue dans cet océan de tragédie. Dans ce passage empreint de douceur, le premier thème est lumineux alors que le motif descendant de la partie centrale, asymétrique rythmiquement de façon très perceptible, amène un brin d'inquiétude. Mais cela est balayé par le troisième mouvement noté Allegro molto vivace. Tchaïkovski évoquait à son sujet un moment "solennellement jubilatoire" ! Et à la façon de faire de Mikko Franck et de son Philhar', on peut dire que les recommandations du compositeurs ont été scrupuleusement respectées. Un phrasé précis et net, une petite saccade au rythme très plaisante, une articulation toujours soignée et pourtant, cela a été le moment choisi par un groupe de jeunes pour quitter l'auditorium ! Malgré la beauté des cordes et de la petite harmonie. Le Finale enfin, grand moment élégiaque, adieu à la vie, a encore été interprété avec un phrasé précis, et une ligne musicale pleine de sens et de substance. Malgré la lenteur du tempo, point trop d'emphase mais au contraire, énormément d'éloquence. Une interprétation restée sobre, au service de la musique et non des effets faciles et grossiers qui peuvent parfois être associés à la Pathétique de Tchaïkovski. Encore un vendredi soir de qualité avec l'Orchestre Philharmonique de Radio France !

Concert disponible à l'écoute pendant un mois sur le site de France Musique

Programme du concert du 24 septembre 2021
SOFIA GOUBAÏDOULINA
Light and Darkness pour orgue solo

DIMITRI CHOSTAKOVITCH
Concerto pour violoncelle et orchestre n° 2

PIOTR ILYITCH TCHAÏKOVSKI
Symphonie n° 6 «Pathétique»

SOL GABETTA violoncelle
LUCILE DOLLAT orgue
ORCHESTRE PHILHARMONIQUE DE RADIO FRANCE
MIKKO FRANCK
 direction

 

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