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Publié par andika

Pour son deuxième programme de la saison à la tête de l'Orchestre National de France à la Maison de la radio et de la musique, Cristian Măcelaru a quelque peu délaissé la musique française pour se pencher sur des compositeurs russes. Avec tout d'abord, le fameux Concerto pour violon de Piotr Ilitch Tchaïkovski, avec la complicité d'un habitué des lieux, le violoniste Leonidas Kavakos, artiste en résidence cette saison à Radio France. Puis la drolatique Symphonie n°9 de Dmitri Chostakovitch. Mais comme le chef roumain semble beaucoup apprécier notre répertoire national, il ne pouvait décemment pas se priver d'un compositeur français pour ce concert du jeudi 23 septembre 2021. L'opportunité de découvrir le très rare Palais hanté de Florent Schmitt.

Orchestre National de France le 23 septembre 2021 (© Radio France)

Orchestre National de France le 23 septembre 2021 (© Radio France)

Tchaikovski compose son Concerto pour violon en 1878 à Clarens, sur les bords du Lac Léman, suite à l'échec de son mariage avec Antonia Milukova. Partition d'abord destinée au violoniste Lepopold Auer, ce dernier refusa de la jouer, l'estimant inexécutable. Finalement créé à Vienne le 8 décembre par le violoniste Adolf Brodsky sous la direction de Hans Richter, le soliste popularisa la partition (qui est encore au sommet du répertoire aujourd'hui) et en devint ainsi le nouveau dédicataire ! La virtuosité prend rapidement ses droits dans ce concerto après une ébauche du thème par les cordes de l'orchestre dans l'Allegro moderato avant que le soliste ne l'énonce franchement. Dans le jeu de Leonidas Kavakos, on entend beaucoup de cantabile, un phrasé toujours impeccable, peu pollué par le vibrato. Un son propre avec une ligne mélodique assurée et précise. Ce dernier se joue de toutes les embûches techniques, que ce soient les triples croches, les intervalles et les rythmes pointés. On ose à peine respirer pendant la cadence, et Cristian Măcelaru ne s'y trompe pas, totalement captivé par son soliste pendant ce moment de grâce. L'Orchestre quant à lui n'est pas en reste dans la douceur et les nuances si bien trouvées pour la Canzonetta. Le chef prend grand soin des contre-chants et la petite harmonie se déploie avec allégresse. Le Finale joyeux et brillant emporte tout dans son style tzigane et ses rythmes bondissants que le chef et le soliste maîtrisent à merveille. Mais quel contraste avec le bis de Leonidas Kavakos, qui n'est autre que la Loure de la Partita pour violon seul de Jean-Sébastien Bach. Un moment de calme et de recueillement avant de reprendre ses esprits lors de l'entracte.

Toujours la Russie, mais celle soviétique du 20ème siècle avec Dmitri Chostakovitch. Sa Symphonie n°9 est sa troisième et dernière symphonie de guerre après les 7ème et 8ème. Composée en 1945, elle célèbre la victoire des Alliés. Mais là où Staline attendait de la grandiloquence et une immense partition composée à sa gloire, Chostakovitch a opté pour une joie pure, simple, enfantine, pleine de plaisanterie et d'humour et peut-être même un peu grotesque et parodique. Rappelant qu'il s'agissait avant tout de cirque lors des répétitions de la première. Et comme on pouvait s'y attendre, Staline n'a que peu goûté à ce ton. Tant et si bien que le compositeur ne reviendra à la symphonie qu'en 1953, après la mort du Père des peuples. Divisée en cinq mouvements, les trois derniers s'enchaînant sans pose, elle rappelle le style de Haydn, autre compositeur ne manquant pas d'humour. Petit effectif classique à l'orchestre, hormis le pupitre de percussions très fourni. L'Allegro commence de la façon la plus traditionnelle de la forme sonate avec un premier thème enjoué et enlevé. Le chef ici obtient un son aérien et dynamique aux cordes, des sourires jalonnant déjà les visages des musiciens. Beaucoup d'énergie et d'engagement, surtout lorsque l'on s'éloigne un peu du carcan classique de la forme sonate et que les cuivres (trompette) et la petite harmonie (picolo) ne viennent jouer les troubles fête. Dans le Moderato, le petite harmonie devient stridente et le climat s'assombrit. Au contraire, dans le Presto, ce même pupitre est lumineux et virevoltant, dans la plus pure tradition française. Tradition française, une fois plus avec le merveilleux basson de facture française de la première solo de l'orchestre dans ce fameux Largo. Marie Boichard brille par sa musicalité, et la couleur très sombre du chant qu'elle imprime à ce long solo. Le Finale enfin, qui retrouve un tempo rapide permet ici à chaque pupitre de briller au gré des prises de parole dans le premier thème et ses inversions suavement distillées. Dans un déluge de percussions, la conclusion impressionne, cependant, on déplorera une lecture un peu trop sérieuse de cette partition qui aurait mérité un peu plus de parodie et de grotesque, notamment dans les dernières pages qui ne sont rien d'autre que du cirque grâce à une fanfare fournie ! Fanfare un peu timide sur ce coup mais ô combien jolie.

Enfin, le trop rare Palais Hanté de Florent Schmitt est l'excellente surprise de ce programme. Le compositeur, lauréat du prix de Rome, composa cette partition à la Villa Médicis lors de son séjour. Mais il ne manqua pas également de circuler dans toute l'Italie durant ses quatre années dans ce pays. Le poème symphonique s'inspirant d'un texte d'Edgar Allan Poe. Le National ici retrouve tout son éclat et son brillant avec une direction claire, nette et précise pour un grand moment de plaisir rempli de gigantesque tutti, dans ce si beau répertoire français. Et ne pouvant pas s'arrêter là, un bis était une nouvelle fois proposé par l'Orchestra National de France. Et pour faire bonne mesure et équilibrer le programme, de nouveau un compositeur français avec un extrait de la Symphonie n°2 de Camille Saint-Saëns ! Décidément, Cristian Măcelaru ne se refait pas !

Concert disponible à l'écoute pendant un mois sur le site de France Musique

Programme du concert du 23/09/2021 à la maison de la radio
PIOTR ILYITCH TCHAÏKOVSKI
Concerto pour violon et orchestre

DIMITRI CHOSTAKOVITCH
Symphonie n° 9

FLORENT SCHMITT
Le Palais hanté

LEONIDAS KAVAKOS violon
ORCHESTRE NATIONAL DE FRANCE
CRISTIAN MĂCELARU
 direction

 

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