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Publié par andika

Le jeudi 17 juin 2021 devait marquer le concert d'adieux d'Emmanuel Krivine à la tête de l'Orchestre National de France à l'auditorium de la Maison de la radio et de la musique  mais comme on le dit parfois, de l'eau a coulé sous les ponts. Une pandémie de coronavirus, un chef démissionnaire et pourtant, un programme presque intact pour ce concert juste avant l'été de la phalange parisienne. Place au jeune chef américain, James Feddeck, également organiste, pour un concert mêlant musique française, sève de cet orchestre, et musique germanique. Avec, tout d'abord, l'ouverture de Béatrice et Benedict de Beriolz, et la trop rare Symphonie en ut de Bizet. Enfin, pour conclure, la Symphonie n°3 dite Rhénane de Robert Schumann.

Ce qui frappe d'entrée à l'aurée de ce concert, c'est la disposition particulière de l'orchestre qu'a choisie James Feddeck. Les premiers violons à sa gauche, les seconds à sa droite juste devant les cors, le reste des cuivres étant bien à l'arrière, juste en face du chef, derrière la petite harmonie, les cordes graves étants placées sur la gauche, avec des espaces vides inhabituels sur le plateau. Autre détail saisissant, les pupitres ont enfin retrouvé une configuration normale. Une partition pour deux aux cordes, et on entend immédiatement que l'orchestre gagne en cohésion. Et cela s'entend dans l'ouverture de Béatrice et Bénédict de Berlioz. Cet opéra comique, adapté de la pièce Beaucoup de bruit pour rien de Shakespeare, a été achevé en 1862. L'humour et la poésie y combinent à merveille surtout lorsqu'on a un chef qui fait chanter l'orchestre comme cela. Une direction légère, (le chef sautant régulièrement sur son pupitre), un son coloré, des attaques dynamiques et joyeuses où la petite harmonie brille, surtout dans l'Andante où la clarinette énonce une thème purement mélodique qui sera chanté ultérieurement par Béatrice dans l'opéra. Enfin, les tuttis maîtrisés et équilibrés finissent de nous convaincre que nous avons affaire à un chef qui sait où il va.

La Symphonie en ut de Bizet aurait pu tomber dans l'oubli si sa partition n'avait pas été retrouvée par hasard dans un legs de Reynaldo Hahn au conservatoire de Paris en 1932. Elle avait pourtant été composée en... 1855. Puis oubliée. Bizet estimant qu'il s'agissait là simplement d'un petit exercice d'étudiant. Composée en un mois par le compositeur,  à l'âge de dix-sept ans, elle se distingue par le vigueur des parfums qu'elle dégage et l'énergie de ses rythmes. De facture classique, en quatre mouvements, elle commence par un Allegro de forme sonate. Le chef donne à l'orchestre encore une fois beaucoup de légèreté, notamment aux cordes. On retrouve également de la couleur et de l'enthousiasme, les hautbois chantant le second thème avec gourmandise et beaucoup de chaleur. Le deuxième mouvement noté Adagio est une lente cantilène lyrique, les cordes sont encore denses, avec ce qu'il faut de vibrato, le hautbois chante la mélodie avec délectation avant qu'un épisode fugué n'intervienne. Un polyphonie très rigoureuse aux cordes obtenue par le chef permet de bien apprécier les quatre voix de ce passage. Le troisième mouvement est un scherzo au rythme ferme où la patte orchestrale est encore une fois très légère avant que le Finale n'emporte tout dans un tempo frémissant et une ambiance feu follet, où l'on retrouve avec joie le premier thème du premier mouvement. Une symphonie bien trop rare au concert et pourtant si belle !

La Symphonie n°3 de Schumann dite rhénane tient son nom du compositeur lui-même, il souhait d'abord intituler son oeuvre, Episode d'une vie sur les bords du Rhin. Il est vrai qu'il était en poste à Düsseldorf en 1850, année de la composition de la partition, et qu'il aimait se promener au bord du fleuve. La rythmique vigoureuse détermine souvent l'architecture de la symphonie, surtout aux premier et dernier mouvements. Le premier mouvement noté Lebhaft (Vivace, animé) débute par un rythme syncopé en tutti. Le mouvement entier est un élan continu et énergique, notamment grâce à cette tonalité de mi bémol majeur. Le chef ici, n'accentue pas les rythmes mais se concentre sur la puissance du son produit par l'orchestre et adopte une posture qu'on pourrait rapprocher du concept de force tranquille. Bien que la vivacité rythmique soit un peu atténuée dans cette approche, on apprécie les couleurs et les effets (gros son des cordes, cuivres exposés et brillants). Le rythme s'exprime davantage dans le Scherzo, énergique et très clair au niveau des plans sonores, avant  la quiétude du troisième mouvement noté Nicht Schnell (pas rapide, Andante) qui sert de transition au sombre quatrième mouvement Feirlich (solennellement) où les graves (superbes trombones) de l'orchestre sont habilement mis en valeur par le chef qui trouve ici, l'équilibre parfait. Le cinquième mouvement noté une fois de plus Lebhaft est léger et festif, et ici, on gagne en accentuation rythmique ce qui manquait au début. Une atmosphère de liesse populaire s'installe où on apprécie à fond les impressionnants tuttis. Lecture maîtrisée du chef d'une partition délicate, où il a su ménager ses effets et mobiliser l'orchestre où il le fallait. A Paris coule paisiblement le Rhin.

 

Programme du concert du jeudi 17 juin à l'auditorium de la maison de la radio et de la musique
HECTOR BERLIOZ
Béatrice et Bénédict (ouverture)

GEORGES BIZET
Symphonie en ut majeur

ROBERT SCHUMANN 
Symphonie n°3  en mi bémol majeur op. 97 « Rhénane »

ORCHESTRE NATIONAL DE FRANCE
JAMES FEDDECK 
direction

 

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