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Publié par andika

Samedi 14 octobre 2017 avait lieu à l'auditorium de la Maison de la Radio un concert de l'Orchestre Philharmonique de Radio France, dirigé par Cristian Macelaru, avec un programme résolument Américain. Les Quatre Saisons de Piazzolla, et le concerto pour harpe de Ginastera pour l'Amérique du Sud. Mixed Messages de Nico Muhly (création française) et la symphonie avec orgue de Copland pour l'Amérique du Nord. De quoi faire de belles retrouvailles avec le Philhar après l'Eroica en début d'année !

Programme assez novateur qui sort un peu de ce que j'ai l'habitude d'entendre mais au final, cela a donné 100% de belles découvertes. Que ce soit du contemporain comme Muhly dont la pièce date de 2015 ou du plus ancien comme Copland qui m'a juste fasciné. Piazzolla, je connaissais depuis le collège, avec notamment Liber Tango, La Milonga Del Angel, La Muerte del Angel, Adios Nonino ou encore Fuga y Mysterio. Ginastera, j'en avais entendu parler dans la boîte à musique de Zygel. Copland, je l'ai découvert très récemment grâce à une superbe chronique de Christophe Chassol !

Je crois que si je me laisse pousser les cheveux, je peux me faire passer pour lui.

Avant le concert était organisé un apéro avec Judith Chaine, productrice à France Musique, ainsi que des musiciens du Philhar qui sont venus nous parler musique et même jouer un peu. Le Maestro Christian Marcelaru nous a même gratifié de sa présence, c'était un moment très sympathique. Nous avons pu entendre notamment Oblivion de Piazzolla joué dans un arrangement pour violon, violoncelle et contrebasse.

Mais point de chef pour débuter ce programme avec des extraits des 4 saisons de Piazolla, dans une version de Leonid Desyatnikov. L'orchestration singe celle des 4 saisons de Vivaldi, à savoir un orchestre de cordes et un violon solo (et une petite citation à la fin), qui n'était autre que Hélène Collerette, une des 1er violons solos du Philhar'. Elle était fabuleuse, tandis que les cordes graves étaient très incisives et marquaient bien le rythme dans le I, le printemps. Dans le II, les cordes étaient exploitées à fond, et faisaient toutes sortes de sons, utilisées notamment comme des percussions, et des choses vraiment étonnantes. Les contrechants étaient à tomber, on était vraiment dans du Piazzolla en entendant cet hiver.

Le Maestro a ensuite fait son entrée accompagné de Marie-Pierre Langlamet, harpiste soliste, qui est aussi harpe solo aux Berliner Philharmoniker et qui a la particularité de jouer pieds nus ! Le son de la harpe était amplifié et on a par conséquent pu vraiment en profiter. Dès le début du I, Allegro guisto, on sent que ça pulse, tout cela part sur un rythme très dansant. C'est inspiré du malambo, danse argentine déhanchée à 6/8. L’orchestration est chatoyante mais l'ensemble est vraiment très précis, le bras du chef sans doute. Dans le II (Molto moderato), c'est assez lent, apaisé, les bois brillent et dialoguent utilement avec la harpe, qui se signale par ailleurs avec une cadence magnifique. Enfin le III (Liberamente Vivace) se distinguait immédiatement par les percussions. Il était de nouveau très dansant et offrait de belles dynamiques. Le phrasé de l'orchestre était merveilleux, et le fondu parfait tandis que la harpe tenait le choc et parvenait à se faire entendre. La soliste avait également un sacré jeu de jambe avec les pédales. Une très belle œuvre. Et son bis était encore plus beau et nous a fait découvrir une polyphonie insoupçonnée sur cet instrument.

Après l'entracte, l'effectif du Philhar' a augmenté substantiellement pour jouer la partition de Muhly qui a la particularité d'être né en 1981 ! Le programme parlait de minimalisme, de Glass mais pas du tout ! Dès le début, on sent une grande tension dans les cordes, avec un ostinato en tremolo du plus bel effet. Les cuivres sont mis en avant et on sent l'orchestre beaucoup plus puissant. Les percussions sont très, très variées, encore pire que chez Mahler, c'est dire. Le phrasé est assez sec et haché, tout cela est saisissant. Puis soudain, un solo de violon qui se distingue, un cor anglais qui éclipse tous les autres instruments... Un merveilleux morceau.

Déjà le dernier morceau avec cette symphonie avec orgue de Copland. L'organiste David Cassan était également présent à l'apéro d'avant concert, il nous a expliqué le décalage qu'il existe avec les orgues électroniques. Le son sort avec un peu de retard lorsqu'il appuie sur une touche, ce qui fait que pour se caler sur le temps de l'orchestre, ça peut parfois être compliqué. Et pourtant, la magie a opéré, il n'y a eu aucun décalage, aucun souci de retard, aucun problème rythmique. Le I  (Prelude - Adante) de la symphonie débute tout en douceur avec l'alto, l'orgue entre tout doucement en duo avec la harpe. Il utilise des registrations assez timides qui le rapprochent un peu de la flûte. D'ailleurs, le son de l'orgue est tellement polymorphe qu'il peut imiter à lui seul de nombreux instruments de l'orchestre. Chaque son un peu inhabituel lui était du, c'était assez insolite. On constate la qualité de la circulation du son, des solos et surtout, la douceur de cette musique. Tout change dans le II (Scherzo Allegro Molto) avec un rythme très, très marqué et une puissance impressionnante de l'orchestre, dans des fortissimo presque assourdissants. Une fois de plus, l'orgue amène un peu de confusion pour l'oreille non habituée tant son son est riche. Le III (Lento - Allegro moderato) se distingue immédiatement par l'irruption des trombones qui semblent faire un match avec l'orgue. Tout cela est massif. Les registrations de l'orgue offraient enfin son plein et entier potentiel en allant dans des graves très impressionnants. En un mot, ce mouvement est puisant. Avec une incroyable intensité et en même temps, c'est très précis, contrôlé, le bras du chef encore. Il y a un véritable fracas de percussions et d'orgue dans la coda, aidés en cela par le trombone et le tuba, on en sort essoré, sans voix. Un triomphe.

Le concert sera diffusé sur France Musique le 7 décembre 2017 à 20h et sera ensuite disponible à l'écoute sur leur site.

 

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