Sinners: Les monstres rédempteurs
Dans un Hollywood obsédé par les suites, les franchises et les reboots, Sinners de Ryan Coogler débarque comme un coup de tonnerre. Un film original ? En 2025 ? Voilà qui tient presque du miracle. Et ce miracle, Coogler le transforme en uppercut social et esthétique, en revisitant le film d’épouvante comme un manifeste.
Le pitch ? Direction le Mississippi des années 1930, territoire maudit où la ségrégation est loi, la violence raciale omniprésente, et la justice, un mot creux. Coogler s’empare de cette époque avec une audace rare, pour livrer une œuvre hybride, qui commence comme un drame historique avant de glisser, presque insidieusement, vers l’étrange. Pendant une bonne partie du film, pas l’ombre d’un monstre. Pas de sang, pas de crocs. Juste la violence bien réelle d’un système. Et puis, sans prévenir, la nuit tombe. Et avec elle, l’horreur. Pas celle qu’on attendait.
On pense à Une nuit en enfer de Robert Rodriguez, ce moment où le film bascule et vous cloue au siège. Mais là où Rodriguez joue la carte du délire pulp, Coogler, lui, injecte du sens. Ses monstres ne font pas juste peur — ils questionnent, accusent, réparent. Ils incarnent une contre-proposition radicale : celle d’un monde où l’horreur surnaturelle vaut mieux que l’oppression bien réelle.
Michael B. Jordan livre ici l’une de ses prestations les plus marquantes. Il incarne deux frères jumeaux, figures opposées d’un même mal-être. L’un, discret, cherche à s’intégrer, à ménager sa peau dans un monde qui ne lui fait aucun cadeau. L’autre, plus rebelle, refuse d’avaler les humiliations quotidiennes. Entre les deux, un tiraillement : faut-il composer avec l’injustice ou la rejeter coûte que coûte ? Quand le surnaturel entre en scène, c’est ce duo qui cristallise toute la tension dramatique du film — et sa beauté.
Sinners, ce sont les pécheurs. Mais pas forcément ceux qu’on croit. Ici, pécher, ce n’est pas renier la foi ni flirter avec l’occulte : c’est perpétuer un ordre injuste, en silence ou à visage découvert. Et s’il faut des monstres pour le dénoncer, alors qu’ils viennent, qu’ils dansent, qu’ils chantent avec les griots.
Un film d’épouvante grand public qui ose ce discours là ? Oui, ça existe. Et c’est salutaire.
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Alors qu'ils cherchent à s'affranchir d'un lourd passé, deux frères jumeaux reviennent dans leur ville natale pour repartir à zéro. Mais ils comprennent qu'une puissance maléfique bien plus ...
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