Carrie au bal du diable: La fin de l'innocence
Les cinémas UGC organisent des séances appelées "Scary Vendredi" les vendredis soirs où ils proposent de découvrir ou de redécouvrir des films du genre de l'épouvante/horreur sur grand écran. Et récemment, ça a été l'occasion pour moi de découvrir le classique de Brian de Palma, à savoir Carrie, adapté du premier roman de Stephen King. Et devant ce film, je me suis dit que c'est fou à quel point Brian de Palma était cool il y a 50 ans.
L'histoire est simple, la jeune Carrie (exceptionnelle Sissy Spacek) est le souffre douleur de son école. Personne ne l'aime, elle est marginalisée, isolée, moquée, harcelée, probablement parce que dans sa petite ville, les gens n'aiment pas trop le prosélytisme religieux de sa maman (terrifiante et hilarante Piper Laurie).
Et ce qui frappe d'emblée, c'est que ce film ne vieillit pas. La problématique du harcèlement scolaire est toujours prégnante de nos jours, et on y est de plus en plus sensibilisé. Et De Palma dans sa mise en scène souhaite clairement en faire le sujet principal, et prend un grand soin à filmer tous ces personnages d'adolescents, plus cruels les uns que les autres envers Carrie. Le thème du harcèlement est traité avec la plus grande rigueur.
Harcèlement, cruauté, et bien entendu, fin de l'innocence enfantine dans le milieux scolaire où le darwinisme social fait son œuvre. Soit on est intégré au groupe, soit on en est exclu. Et cette dureté n'est qu'un prémices du monde adulte où Carrie va entrer par le truchement de ses premières règles.
C'est l'élément déclencheur de toute la crise qui occupe ce film. Sous la douche, après le sport, la découverte des règles, de son corps de femme, de son fonctionnement, mais aussi, l'éveil à la sexualité avec l'enjeu du bal de promo, tout vient percuter Carrie d'un seul coup qui passe de l'innocence à la compétition avec ses congénères en un rien de temps.
La façon de filmer le vestiaire avec un traveling, de montrer le sang dans l'eau, d'utiliser une musique proche de celle d'Hermann dans Psycho, la douche, on sent que De Palma connaît ses classiques et fait de subtiles références à Hitchcock, mais s'approprie également son sujet, notamment dans la scène du bal avec son usage dévastateur, et inédit à l'époque, de l'écran partagé. Les effets visuels sont très soignés et les acteurs tous excellents. A cet égard, on y découvre un très jeune John Travolta qui sera amené à faire une belle carrière.
Carrie de De Palma, c'est la maîtrise, la malice, la peur. Pas tant la peur des éléments surnaturels, mais au contraire, de la cruauté ordinaire qui s'abat quotidiennement dans la banalité des cours d'écoles.