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Publié par andika

Le Comte de Monte-Cristo est probablement mon roman préféré, et assurément mon ouvrage favori d'Alexandre Dumas. J'avais découvert cette histoire enfant, grâce au téléfilm de Josée Dayan à la fin du siècle dernier. A l'âge de 16 ans, j'ai acheté le livre, en deux tomes, version poche chez Folio, pour le lire l'été. Mais je l'ai commencé à la fin de l'été, ce qui a eu pour conséquence de mettre en péril quelque peu ma scolarité en début de classe de Première. Effectivement, au lieu de réviser sagement mes cours durant les deux premières semaines suivant la rentrée, je ne pouvais pas me détacher de ce livre qui m'obsédait.

Mais apprès l'avoir lu, je me suis rendu compte que peu d'adaptations audiovisuelles pouvaient rendre justice à ce roman. J'ai réévalué à la baisse le téléfilm de Josée Dayan et la performance de Gérard Depardieu, et j'ai fini par me convaincre qu'il n'était pas vraiment possible d'adapter convenablement ce livre.

Cependant, par égard pour Dumas, quand une nouvelle adaptation, réalisée par des français, sort au cinéma, je garde tout de même la curiosité d'aller la voir. Il en va donc ainsi du film de Matthieu Delaporte et d'Alexandre De la Patellière qui étaient d'ailleurs déjà impliqués dans l'adaptation des Trois mousquetaires, sortie l'année dernière.

Le Comte de Monte Cristo est un excellent film avec une énorme performance de Pierre Niney. Très beaux décors et costumes. La photographie par moments est à tomber par terre, et on voit bien à l'écran que les moyens déployés ont été bien utilisés. Visuellement, le film propose constamment quelque chose d'intéressant. On sent réellement un souci d'offrir avant tout un long métrage accessible pour le spectateur. Mais au détriment du lecteur du roman...

Mais en trois heure de temps, il est impossible de demeurer fidèle au roman. Cependant, il n'est pas non plus nécessaire de se livrer à des inventions et à prétendre corriger la copie de Dumas. Et plus que de rentrer dans les détails des diverses modifications, pour ne pas dire, trahisons, il convient avant tout de noter que les perosnnages perdent en profondeur et en complexité. Avec le souci de dynamisme de ce film, on ne prend pas le temps de faire infuser les choses. Et on ne prend pas non plus le temps de les résoudre. La vengeance n'en devient que plus fade, alors même que la séquence du château d'if était vraiment réussie.

Mais ici, l'état d'esprit des scénaristes n'a jamais été de se demander ce qu'il fallait absolument garder dans le film, mais au contraire, celui de chercher des moments de tensions dramatiques. Mais la tension, lorsqu'elle est mal construite, ne fonctionne pas vraiment. Pourtant, il s'agit ici de la première adaptation que je vois qui rend un peu justice au personnage d'Haydée, l'esclave grecque de Monte Cristo. Des dialogues de Dumas sont conservés, comme dans la scène de la nuit où Mercedes vient confondre Dantes, le dîner d'Auteuil qui même s'il subit quelques variations, demeure satisfaisant. Toutefois, les personnages perdent trop. Danglars devient simplement un collègue jaloux et opportuniste, Villefort est un homme seul, sans famille (hormis le personnage inventé de sa sœur), et Fernand enfin, est un aristocrate dès le début à Marseille, ce qui fait perdre beaucoup de profondeur au personnage.

Dantès enfin ici, malgré la grande performance de Pierre Niney, n'est qu'une pâle représentation du personnage quasi divin du roman. Sa vengeance dans ce film est une vaste blague, mais surtout, jamais il ne se révèle à ses ennemis en prononçant la phrase qu'on attend tous: "Je suis Edmond Dantès !" Ce qui est un comble. En outre, il se montre ici terriblement vulnérable par certains moments, chose inimaginable dans le roman, où il sait bien que ses adversaires ne peuvent plus l'atteindre.

Donc pour finir, citons ce texte qui résume bien la pensée de Dantès, bien mieux que ce film.

 

Écoutez, dit le comte; et son visage s'infiltra de fiel, comme le visage d'un autre se colore de sang. Si un homme eût fait périr, par des tortures inouïes, au milieu des tourments sans fin, votre père, votre mère, votre maîtresse, un de ces êtres enfin qui, lorsqu'on les déracine de votre cœur, y laissent un vide éternel et une plaie toujours sanglante, croiriez-vous la réparation que vous accorde la société suffisante, parce que le fer de la guillotine a passé entre la base de l'occipital et les muscles trapèzes du meurtrier, et parce que celui qui vous a fait ressentir des années de souffrances morales, a éprouvé quelques secondes de douleurs physiques?

Alexandre Dumas Père. « Le comte de Monte-Cristo. »

De sorte que, après une relative déception devant une la tâche impossible qu'est celle d'adapter le Comte de Monte Cristo au cinéma, il ne me reste plus que deux mots de la langue française: Attendre et espérer. Espérer être comblé. Mais en attendant, le livre reste !

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D
Une vision du film nettement plus sévère que la vôtre :<br /> <br /> https://www.causeur.fr/le-comte-de-monte-cristo-film-2024-un-malheur-de-plus-pour-alexandre-dumas-286460
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A
Je l’ai déjà lue