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Publié par andika

Un peu plus de deux années sont passées depuis Dune Partie 1, qui offrait une immersion totale sur la planète Arrakis, et nous permettait de renifler les premières effluves d'épice. Et on reprend les choses exactement où on les avait laissées dans Dune partie 2, avec notre protagoniste, Paul Atreides, recueilli par les Fremen.

L'intérêt principal de Dune est de subvertir la quête du héros. Traditionnellement, le héros d'une histoire est quelqu'un de bon, à qui il arrive des épreuves, en règle générale, il les surmonte, prend de l'expérience, et parvient à triompher à la fin. Ce schéma se reproduit dans Dune mais cependant, on y sent une certaine fatalité.

Car en effet, ici, le protagoniste Paul, n'est pas un héros. Son don de prescience lui fait bien voir que, s'il emprunte le chemin qu'on attend de lui, un véritable génocide aura lieu. Le prix à payer pour triompher de tous ses ennemis. Car dans sa quête, pour défendre sa cause, Paul ne peut absolument pas se soustraire au fanatisme des Fremen, qui le voient comme un prophète, celui qui les guidera au paradis.

Denis Villeneuve a le bon goût de coller à cet enjeux particulier tout au long de son film. En restant très près de ses personnages. Le premier acte s'articule ainsi autour de Paul (stupéfiant Timothée Chalamet), Stilgar (magnifique Javier Bardem en premier apôtre fanatique), et Chani (charismatique Zendaya en caution morale du public). On suit ainsi son initiation aux rites Fremen, et son assimilation totale à sa nouvelle famille. Mais plus on avance, et plus on constate que ce parcours a un prix. Que les dés sont pipés et que des forces supérieures le conduisent vers un destin qu'il refuse de toutes ses forces. Car on le voit comme un prophète, et les croyances religieuses sont une arme redoutable. Bien plus puissante que l'argent et le feu. Et comme le dit Stilgar à un moment, on se moque que Paul y croie, tant que ses disciples y croient.

Le fanatisme religieux ne se base sur aucune base rationnelle. Ainsi, un même événement pourra prendre des sens radicalement opposés selon la superstition des fanatiques. Et plus on essayera de les contredire, plus ils s'enfonceront dans leur croyance. Tous ces aspects sont le cœur du film. Toutes les démonstrations de ferveur religieuse sont autant de piques dans le cœur du spectateur, qui regarde les personnages s'enfoncer avec ardeur, sur un chemin qui mènera à beaucoup de souffrance. Et ces séquences, cette ferveur ostentatoire, occasionnent parfois le rire, tantôt la crainte, et toujours beaucoup d'émotions.

Et comme dans une tragédie grecque, le héros ne peut pas échapper à son destin. Même si les croyances ont été fabriquées et attisées par des personnes aux intérêts bien précis.

En outre la photographie demeure magnifique. Le temps passé dans le désert fait que les teintes orangées sont plus présentes, cependant, la séquence en noir et blanc sur la planète des Harkonen est un modèle d'esthétisme. Les séquences d'action, finalement peu nombreuses, sont toutes réussies. La composition des plans est toujours magnifique. Denis Villeneuve ne reculant jamais devant un plan large filmant de grands espaces. Mais il excelle également en filmant les visages de ses comédiens en gros plan.

En dehors du fanatisme religieux, le film aborde également le thème du fascisme. Armées de crânes rasés chez les Harkonen, qui traitent constamment les Fremen de rats. Soldat bien en rang sur de vaste espaces, comme à Nuremberg. Même si cela manque parfois de subtilité, le message passe avec efficacité, et renforce la nécessité de la victoire pour Paul, surtout face au terrifiant Feyd-Rautha (exceptionnel Austin Butler en tueur psychopathe).

Parce que dans ce monde au-delà de la cruauté, basé sur l'eugénisme, la manipulation, la trahison et le meurtre, le triomphe d'un homme bon à la base, ne peut pas survenir sans qu'il ne se compromette. Et là réside la fatalité du récit de Dune. Pour gagner, il faut devenir comme celui qu'on combat. Ainsi, la promesse de paradis qui rassemble les Fremen va devenir pour les autres, une promesse de terreur via la djihad (mot jamais prononcé et pourtant, évident, et présent dans le roman). Et sur cet aspect particulier, à hauteur d'homme, Dune partie 2 est une réussite incontestable. Car le triomphe du personnage principal n'est jamais célébré comme un événement libérateur. Bien au contraire.

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