Tenet: "Don't try to understand it, feel it."
Tenet est le nouvel opus du réalisateur à la mode, Christopher Nolan. Il s'agit d'un film très ambitieux. Mais comme Icare, il finit un peu par se brûler les ailes. Ce film est dans la lignée d'Inception pour la notion de concept, mais aussi d'Interstellar et de Dunkerque pour le traitement du temps... Par conséquent, on cumule le concept de l'inversion temporelle où les personnages vont du futur vers le passé en marche arrière, avec les principes narratifs assez particuliers des opus précédents. Nous avons donc tous les ingrédients pour obtenir quelque chose d'artificiellement complexe et de difficilement compréhensible. La réplique de la scientifique jouée par Clémence Poésy au début du film étant à cet égard cruellement explicite "N'essayez pas de comprendre."
Vous aurez sans doute remarqué que le mot Tenet est un palindrome. L'ambition de ce film est par conséquent d'être un palindrome cinématographique et sur ce plan, c'est raté. Si on vous présentait un montage allant de la fin au début du film, vous ne verriez pas du tout la même chose. Ce qu'il y a de palindromique dans ce film, c'est simplement la façon qu'il a de revisiter ses propres scènes d'une autre perspective, avec le fameux concept d'inversion. Mais le palindrome, on ne l'inverse pas, on change simplement le sens de lecture mais la teneur du mot demeure la même.
En plus des difficultés de narration inhérentes au concept, on se retrouve avec des dialogues fonction qui sonnent très artificiels et qui ont pour seule utilité de nous livrer des informations (l'apparition de Michael Caine est une belle illustration de cet état de fait). Et quand les dialogues sont un peu plus intéressants, le mixage sonore fait de basses assourdissantes peut parfois nous empêcher de les entendre ! Pour un film d’espionnage, c'est un peu dommage.
En plus des dialogues fonction, nous avons aussi des personnages fonction, avec le plus illustre d'entre eux, le fameux Protagoniste (c'est comme ça qu'on l'appelle dans le film !), personnage principal incarné par le pourtant intéressant John David Washington. Mais on a l'impression que son seul but, sa seule motivation, est justement d'être le personnage principal de ce film et de se fondre dans l’archétype du héros qui sauve le monde. On a également l'archétype du méchant, mafieux russe, nommé Sator, interprété par un Kenneth Branagh un tantinet cabotin. Robert Pattison, quant à lui tient la fonction de compagnon mystérieux du héros, l'aidant à dénouer les situations chaudes. Mais on aura rarement entendu un accent britannique aussi prononcé que celui de personnage de Neil de la part de cet acteur ! Au moins, certaines scènes ne manquent pas d'humour entre tous ces comédiens.
Néanmoins, les séquences d'action fonctionnent, et à défaut de comprendre, on ressent un certain plaisir, notamment sur la séquence de l'autoroute qui à elle seule, sauve un peu le film. Il s'agit ici de la course poursuite la plus excitante au cinéma depuis celle de Matrix 2. Mais aussi, le film commence à fonctionner lorsqu'il embrasse frontalement son concept, sans plus essayer de l'expliquer ou de créer un mystère autour. Lorsqu'on met les deux pieds dans le plat et qu'on fait faire des choses vraiment significatives à nos personnages. Il est simplement dommage d'avoir attendu la fin, ou le début. Cela devient confus à un moment !