Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

Pages

Publié par andika

Vendredi 14 janvier 2021, l'Orchestre Philharmonique de Radio France avait prévu de retrouver son ancien directeur musical Myung-Whun Chung à la Philharmonie de Paris, en compagnie du Choeur et de la Maîtrise de Radio France, afin d'interpréter la monumentale Symphonie n°3 de Gustav Mahler. Mais comme le Sars-Cov-2 est toujours là, il continue de bouleverser quelque peu la vie culturelle dans le monde. Ainsi, à cause de la situation sanitaire, un certain nombre d'interprètes n'était pas disponible, notamment dans le pupitre de cuivres, très largement sollicité par cette partition. Qu'à cela ne tienne, le Philhar' étant plein de ressources, un programme de remplacement a été trouvé, et quel programme ! Tout d'abord le Triple concerto pour piano, violon, violoncelle et orchestre de Beethoven, avec Ji-Yoon Park au violon, Eric Levionnois au violoncelle et la participation exceptionnelle de Myung-Whun Chung au piano. Et pour faire bonne mesure, la Symphonie Pastorale du même Beethoven en deuxième partie.

Poster du concert

Il est étonnant que la pandémie qui nous a privés de l'année Beethoven en 2020, nous restitue un programme 100% Beethoven en 2022 ! Quelle belle ironie. Après un rendez-vous en plein coeur du confinement en mars 2021 où Myung-Whun Chung était à la tête de l'Orchestre Philharmonique de Radio France notamment pour la Symphonie n°7 de Beethoven, on remarque que ce chef est lié à cet immense compositeur auquel il revient en cas de coup dur !

Le Triple concerto a été composé en 1804 mais révélé seulement en 1808 au public. L'ambition de Beethoven était de renouer avec le style du concerto grosso où plusieurs solistes dialoguent avec l'orchestre, mais aussi d'allier la musique de chambre à la musique concertante. Il ne s'agit pas de l'oeuvre la plus marquante de son auteur mais elle en porte indubitablement la marque. Et surtout, elle permet tout de même aux solistes de briller. Et ils brillent tans l'Orchestre Philharmonique de Radio France recèle de talents. Notamment le premier violon, super solo de l'orchestre, Ji-Yoon Park qui endosse au pied levé la responsabilité du rôle de co-soliste dans ce concerto. Dans le premier mouvement noté Allegro, qui conserve les charmes de la musique de chambre, le chant du violon de la soliste ne cesse d'impressionner, tant par sa technique assurée que par sa musicalité. Eric Levionnois au violoncelle n'est pas en reste avec son superbe vibrato et sa ligne mélodique jamais prise en défaut dans la deuxième mouvement, Largo. Myung-Whun Chung enfin, au piano, face à son orchestre et à côté de ses solistes joue et dirige comme un chef. Au piano tantôt discret, tantôt virtuose. A la baguette, réconfortant à la tête de l'orchestre, toujours bien en place, et très dynamique dans le Rondo final qui enchaîne les couplets et refrains sur un rythme de polonaise de façon vertigineuse.  En bis, l'adagio du trio opus 11 du même Beethoven, où les solistes s'en donnent une fois de plus à coeur joie.

En deuxième partie, rien de moins que la Symphonie n°6, Pastorale. Parfaitement contemporaine de la Symphonie n°5 de Beethoven, (portant elle-même le numéro 5 lors de la création en 1808), son caractère est pourtant radicalement différent. Là où le destin frappe dans la cinquième, la sixième dépeint une nature tranquille, sauf lors de l'épisode de l'orage. Beethoven cède presque ici à la tentation de la musique à programme avant d'affirmer que ce qu'il décrit est avant tout très subjectif et que chaque auditeur doit se faire sa propre idée. Et quelle joie de retrouver cette symphonie qui dépeint la nature là où Mahler lui, ne décrivait rien de moins que l'univers tout entier. Même si les proportions diffèrent, la tonalité est sensiblement la même. Ici, le début est simple, dépouillé et paisible, l'éveil en arrivant dans la campagne est pris avec sérénité par le chef. On apprécie la rondeur de l'orchestre et la petite harmonie qui piaffe dans les tuttis. Le premier thème quant à lui est scandé par des cordes denses et soyeuses, où Ji-Yoon Park a maintenant repris sa place de premier violon. La scène du ruisseau qui vient en deuxième mouvement coule de source sans jamais trainer ni s'alanguir. Au  contraire, le chef en maintient le dynamisme et les interventions des solistes à la petite harmonie qui imitent les animaux, sont merveilleuses (basson, clarinette, flûte, hautbois). Les trois derniers mouvements s'enchaînent dans une ambiance très festive et joyeuse, notamment le troisième mouvement aux attaques franches, la fameuse scène de l'orage construite avec méticulosité. Les nuances, les contrastes dynamiques, tout est fait avec grand soin. Les percussions et les cordes graves sont d'une intensité remarquable avant que la douceur du dernier mouvement ne vienne apaiser l'ensemble et confirmer les sentiments de joie et de reconnaissance après l'orage. Dans ce mouvement à variations, la douceur prime et l'équilibre entre les pupitres n'est jamais pris en défaut. Définitivement une symphonie délicieuse que cette fameuse Pastorale.

A défaut de Mahler, nous avons vu à quel point la complicité entre le Philhar' et son ancien directeur musical est demeurée intense, et aussi, nous avons eu la chance de constater qu'en outre d'être un grand chef, Myung-Whun Chung est également un merveilleux pianiste.

Concert disponible à l'écoute pendant un mois sur France Musique

Programme du concert du 14 janvier 2021 à la Philharmonie de Paris
LUDWIG VAN BEETHOVEN
Triple Concerto pour piano, violon, violoncelle et orchestre*
Symphonie n°6 « Pastorale » 


JI-YOON PARK violon*
ERIC LEVIONNOIS violoncelle*
ORCHESTRE PHILHARMONIQUE DE RADIO FRANCE
MYUNG-WHUN CHUNG
 piano* et direction

 

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article