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Publié par andika

Dans les innombrables films sociaux français qui sortent, on trouve une certaine récurrence dans les sujets traités. La prédilection des cinéastes semble parfois aller vers les classes défavorisées, précaires, pour montrer les difficultés de leur quotidien, et montrer leur héroïsme dans le simple fait de survivre. Plus rares sont les films au sujet de ce qu'on appelle les élites, et pourtant, le sujet est intéressant. Premièrement parce qu'il est assez méconnu. Deuxièmement, parce que les parcours d'excellence sont synonymes de tout sauf de la vie facile.

On se souvient ainsi du remarqué La crème de la crème de Kim Chapiron sorti en 2014 au sujet d'élèves d'une prestigieuse école de commerce (HEC pour ne pas la nommer), qui mettaient en place un réseau de proxénétisme pour égayer les soirées étudiantes. Près de dix ans après, voici La voie royale (on notera une cham lexical similaire dans le titre) de Frédéric Mermoud où on suit les aventures de Sophie (magnifique Suzanne Jouannet, qui excelle dans tous les registres), jeune élève brillante qui intègre une classe préparatoire aux grandes écoles, et un monde bien loin de celui dont elle est issue, elle, la fille d'éleveurs.

Le film commence d'ailleurs sur l'exploitation familiale, où on se lève aux aurores afin de nourrir les bêtes, le labeur est dur, toute la famille participe, les deux parents et les deux enfants. Mais subitement, Sophie  se change et part précipitamment, l'école va commencer. En plus d'aider ses parents sur l'exploitation, Sophie est une élève brillante, surtout en maths où elle donne la solution au problème du prof pendant que tous ses camarades butent. Prof, qui voyant son potentiel, la sensibilise aux CPGE et plus particulièrement la filière MPSI (maths, physique, sciences de l'ingénieur).

Et spontanément, on voit que la prépa, ce n'est pas son monde. Tout cela est flou pour ses parents. Son père disant justement que l'IUT d'agro, il voit où cela mène, la prépa en revanche c'est plus flou. Et effectivement, la prépa est là pour ouvrir les possibilités et exploiter son potentiel au maximum. Et dès qu'on arrive au lycée Descartes à Lyon, grande ville de la région, on voit tout le décalage dans le profil des camarades de Sophie.

Chacun d'entre eux semble prédestiné à être là à cet instant, à cet endroit, depuis le berceau. La plupart sait déjà quelles écoles viser, et est armée d'une solide confiance. Là où Sophie, ne se sent pas vraiment à sa place. Et ce malaise est bien retranscrit par la mise en scène qui se concentre sur le visage de Sophie, ses émotion, et le premier choc des mauvaises notes ainsi que des commentaires acerbes qui lui tombent dessus en prépa.

La prépa, c'est une course de fond avec une pression monumentale que tout le monde ne supporte pas. Et pour certains, il faut un temps d'adaptation. Le film retranscrit avec précision la difficulté et le trouble qui peuvent habiter une personne qui débarque.

En outre, le film n'oublie pas que son sujet, ce sont des jeunes femmes et des jeunes hommes. Même si l'ambiance est globalement studieuse, les blagues potaches ne sont jamais bien loin, la fête, bien que rare, n'est jamais galvaudée (sublime scène dans un bar, aux ralentis et gros plans sur les visages montrant une jeunesse formidable) et la bagatelle s'invite partout, même si le temps manque. Ainsi, Sophie nouera des relations fortes et intenses, alors que en durée, elles ne sont pas si longues, Tout d'abord avec sa voisine d'internat, Diane, élève aux facilités déconcertantes envisageant d'entrer à l'ENS, mais trouvant le temps de faire du théâtre (envoûtante Marie Colomb). Puis, Sophie nouera également une relation avec son parrain Hadrien, jeune élève brillant redoublant sa deuxième année de prépa afin d'entrer aux Mines (charismatique et sympathique Lorenzo Lefebvre). On pardonnera les digressions sur le frère gilet jaune, qui ne sont là que pour renforcer le contraste avec le milieu que Sophie intègre.

La voie royale est un film honnête, qui traite ses personnages avec soin, qui ne néglige aucun enjeux dramatique, et qui, bien que assez naturaliste, n'en oublie pas de faire du cinéma, avec une héroïne qui parachève quête.

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