La Ruse: Des inventeurs d’histoire(s)
La Ruse (Opération Mincemeat en VO), quand on regarde l’affiche, semble être un film d’espionnage se déroulant pendant la Seconde Guerre mondiale. Mais les choses sont un peu plus subtiles que cela. La Ruse, est avant tout une histoire au sujet de personnes qui inventent des histoires et qui font l'Histoire par la même occasion. Et dans l’exercice de la mise en abîme, ce film s’avère très intéressant.
A l’orée de l’année 1943, les Alliés envisagent un débarquement en Sicile. Mais pour que le plan se déroule du mieux possible, il faut faire croire aux Nazis que le débarquement se déroulera ailleurs (en Grèce) et ainsi, faire en sorte que les défenses siciliennes (je suis un joueur d’échecs, on ne se refait pas) soient diminuées.
C’est ainsi que le Comité XX des services secrets britanniques met en place l’opération chair à pâté (Mincemeat). A savoir, l’envoi d’un cadavre d’un prétendu espion sur les côtes espagnoles, chargé de documents apparemment top secrets, mais qui ont en réalité pour destinataires les allemands.
Dites comme cela, les choses paraissent simples, mais pour qu’elles soient crédibles, il convient de mettre en place beaucoup d’éléments et de soigner tous les détails. A commencer par le cadavre à envoyer. Puis lui bâtir une vie, une histoire, et veiller à ce que chaque élément fasse sens.
Et c’est là que le film de John Madden devient passionnant. Car il dépeint le mieux possible de quoi est fait le travail des espions. Non pas d’assassinats ciblés réalisés de façon discrète, avec des gadgets plus ou moins sophistiqués. Non pas de surveillance plus ou moins tendue. Non, le nerf de la guerre, c’est l’information ou la désinformation. Et on constate que ces éléments ont un coût en vie largement quantifiable. Ainsi, il n’est pas étonnant de voir que dans le milieu de l’espionnage, de nombreuses personnes ont des velléités littéraires et se mettent à écrire des romans. A cet égard, le personnage emblématique est celui de Ian Flemming, futur auteur à succès de James Bond.
La mise en scène sobre, filmant le plus souvent les intérieurs avec une photographie assez neutre, permet aux nombreux dialogues de vivre, sans jamais laisser place à l’ennui. On relèvera cependant quelques problèmes de rythme quand le film peine parfois à avancer. Cependant, même si l’issue est connue de tous, certaines scènes parviennent à convoyer un très grand suspens.
Enfin, le casting est excellent, avec un Colin Firth qu’on ne présente plus, qui campe ici le brillant espion Ewen Montagu, plein de flegme et de patriotisme. Mais surtout, sa collègue Jean Leslie, interprétée par une superbe Kelly Macdonald, conscience morale et émotionnelle du film et avatar du spectateur. Ou lorsque que madame tout le monde prend une part déterminante dans le sort de la guerre, en interagissant d’égale à égale avec les meilleurs espions, en apportant toute son intelligence et ses idées. Cette chair à pâté rusée, on la mange donc goulument, car elle invente de belles histoires et elle fait la grande histoire.
1943. Les Alliés sont résolus à briser la mainmise d'Hitler sur l'Europe occupée et envisagent un débarquement en Sicile. Mais ils se retrouvent face à un défi inextricable car il s'agit de ...
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