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Publié par andika

Jordi Savall et son orchestre, Le Concert des nations, ont achevé leur intégrale des symphonies de Beethoven à la philharmonie de Paris le vendredi 15 octobre dernier. Dans une démarche historiquement informée, avec instruments d'époque et éditions des partitions au plus près des indications du compositeur, la proposition ne pouvait être que alléchante. En effet, nous pensons connaitre cette musique alors que les années passants, l'irruption du disque et des chefs mégalomanes nous ont peut-être éloignés de l'intention authentique de l'auteur. Un retour aux sources devient alors quelque chose à même d'attiser la curiosité du mélomane, trop rompu à un Beethoven transformé industriellement.

Jordi Savall et le Concert des nations à la quête du Beethoven authentique dans les 8ème et 9ème Symphonies

La Symphonie n°8 en fa majeur, (op.93) a été écrite et terminée moins de cinq mois après la Septième, le manuscrit portant la date d'octobre 1812. De proportions plus modestes, elle est moins populaire que sa devancière et que celle qui la suit. Et pourtant, elle ne manque pas de charme. En quatre mouvements, avec un authentique menuet, dans le plus pur style de Haydn et de Mozart et la tradition viennoise. L'orchestre de Jordi Savall composé d'instruments d'époque émet tout de suite un son coloré, sobre, et surtout modeste, dans la Grande Salle Pierre Boulez de la Philharmonie de Paris. L'effectif de cordes en effet n'est pas le plus imposant (10.8.6.5.3). Ce que l'on perd en puissance du son, on le gagne en détails et en caractère. La démarche ici n'est pas d'aller dans l'emphase mais au contraire de révéler la pureté de la musique de Beethoven, en toute modestie et humilité. Le premier mouvement noté Allegro vivace e con brio commence ainsi dans une ambiance très chambriste, où le premier thème est exposé de façon énergique aux violons. Une belle articulation et un contrechant constant, notamment des bois, qui seront d'autant plus mis en avant dans le délicieux Scherzado. Dans le Menueto, les attaques sont gourmandes, le rythme bien marqué et le trio avec le cor naturel  et la clarinette détonne et étonne. On entend les pouet pouet qu'on est venu chercher ! Le Finale feu follet termine la première œuvre dans un grand tourbillon de plaisir.

On ne présente plus la Symphonie n°9 ! Et pourtant, elle impressionne toujours autant au concert. Cependant, avec le Concert des nations, on la redécouvre avec plaisir. Encore une fois, l'effectif modeste en réduit les proportions, en diminue le caractère intimidant, et en révèle la science. Nulle métaphysique ici, juste de la musique avec un premier mouvement attaqué avec de la pêche, des attaques très sèches et une ambiance un peu feutrée, alors que le célèbre Scherzo s'épanouit loin de la grandiloquence. Les cuivres ici détonnent, Savall construit le crescendo avec science et Beethoven se révèle. L'Adagio qui suit ne traine pas et cela est très plaisant, avant un final intimiste, malgré la présence du chœur El Leon de Oro où les sopranos se tiennent tranquilles. On est frappé par la modestie et la sobriété de cette musique là où elle est souvent le prétexte d'effusions pas forcément maitrisées. Les solistes ainsi chantent en servant la musique et sans chercher particulièrement les effets. Ce qui termine de faire de ce concert, une soirée au service de Beethoven.

Jordi Savall bouleverse les habitudes, révèle des couleurs inusités mais surtout, est un serviteur de la musique. Cette interprétation étonne sans pour autant rien révolutionner, et c'est là qu'est sa force. Beethoven étant avant tout profondément humain et accessible.

Programme du concert du vendredi 15 octobre 2021 à la Philharmonie

Ludwig van Beethoven

Symphonie n° 8

Symphonie n° 9 "Hymne à la joie"

Distribution

Le Concert des Nations

Choeur El Leon de Oro

Jordi Savall, direction

Sara Gouzy, soprano

Laila Salome Fischer, mezzo-soprano

Mingjie Lei, ténor

Manuel Walser, baryton-basse

Marco Antonio García de Paz, chef de choeur

Jakob Lehmann, violon solo

 

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