Raging Bull: L’esthétisme de la rage
Raging Bull de Martin Scorsese est une leçon de mise en scène. Et c’est aussi une leçon d’interprétation de la part de Robert De Niro dans le rôle du boxeur enragé, Jake La Motta. Dans un noir et blanc élégant, Scorsese nous raconte la vie d’une bête enragée, qui n’en a jamais assez de combattre sur le ring, et de paranoïa dans sa vie.
Le style est aussi soigné que l’histoire racontée scabreuse. On suit la vie de ce boxeur, devenu humoriste sur le tard. On pourrait penser à un rise and fall mais c’est tellement plus que cela. Tant par la narration qui, bien que globalement chronologique, permet parfois de fuir la linéarité. Les scènes s’étirent, le temps se dilate, et une certaine poésie s’invite. Les séquences de boxe s’apparentant davantage à des ballets survitaminés qu’à des combats violents. Les séquences de tendresse entre Vicky et Jake devenant alors des instants très lascifs. Et surtout, un humour noir de tous les instants jalone la pellicule.
Raging Bull, c’est une rage qui ne peut pas se canaliser, malgré l’amour, malgré la violence, malgré la tendresse, malgré toute l’extériorisation. La Motta est aussi violent avec ses adversaires qu’avec son entourage. Mais pourtant, il est aussi capable d’être sensible (les larmes après une défaite, les excuses sincères envers son frère et sa femme). Et on voit dans ce film tout ce qui peut clocher dans une société quand le respect de l’autre n’existe plus. Mais quand cela est fait avec une caméra aussi virtuose que celle de Scorsese, le plaisir n’est jamais bien loin.