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Publié par andika

Il y aurait trop d'orchestres à Radio France. Il y aurait trop de personnel à Radio France, tant et si bien que le 6 juin 2019, jour du concert du National, Le Monde titrait sur les suppressions de postes à la maison ronde. C'est dans ce contexte qu'il fallait se rendre à l'auditorium de la maison de la radio pour chercher un peu d'évasion. Et le programme concocté par Emmanuel Krivine, directeur musical de l'Orchestre National de France, a effectivement permis de s'évader. Tout d'abord en achevant l'intégrale des symphonies de Brahms cette saison avec la Troisième en fa majeur. Puis en rendant une fois de plus hommage à Berlioz en cette année anniversaire de sa disparition avec Harold en Italie, Symphonie avec un alto principal. Et à l'lato, on retrouvait un soliste du National, à savoir Nicolas Bône.

ONF à l'issue du concert du 6 juin 2019 à l'auditorium de Radio France

ONF à l'issue du concert du 6 juin 2019 à l'auditorium de Radio France

La Symphonie n°3 de Brahms a été composée en 1883, à une époque où il n'avait plus aucune prévention avant d'aborder l'écriture pour orchestre. Célébrissime page de répertoire, notamment grâce à son 3ème mouvement. Brahms déplorait alors qu'il s'agisse d'une "symphonie malheureusement trop célèbre."  Et pourtant, elle mérite d'être connue, de par une certaine mélancolie qu'elle véhicule mais aussi par sa force et son intensité. Et le maestro prend les choses à bras le corps dès le début. Les dynamiques, les couleurs, une vraie densité aux cordes. La puissance de l'orchestre trouve à s'exprimer dès les premières pages et prend possession de l'auditorium dans une acoustique confortable. La battue vigoureuse et démonstrative du chef ne verse pas dans l'agitation inutile, au contraire, malgré le côté spectaculaire de la gestique, l'ensemble reste sobre. Et pourtant, cet Allegro con brio n'est pas tranquille, bien au contraire contraire de l'Andante qui permet de mettre en valeur une très belle petite harmonie aux couleurs chatoyantes. La fameux et attendu Pocco allegretto est le moment d'un miracle. Les cordes et plus spécifiquement les violons menés par Sarah Nemtanu produisent un son emprunt de vibrato et d'émotions. Tandis que le thème circule successivement de pupitre en pupitre dans une douceur rare. Le contraste était d'autant plus saisissant avec le final. Le son devient sombre, opaque, avec des bois dans le registre grave. La cordes sont sèches et les attaques deviennent brèves et cliniques. Tout ce qu'il y avait de paisible auparavant disparait tout d'un coup. On sent une vague qui emporte tout, et qui était un peu contenue mais qui parvient enfin à passer les digues. Étonnant Allegro qui vient mettre une once d'inquiétude dans une interprétation qui était jusque là assez sobre. A l'issue de l'exécution de la 3ème de Brahms, Emmanuel Krivine a pris la parole pour dire qu'après des moments comme cela, on avait la preuve qu'il n'y avait pas suffisamment d'orchestres à Paris !

Harold en Italie est la Deuxième Symphonie d'Hector Berlioz. Mais il ne se contentait jamais de composer une symphonie, il lui fallait toujours inventer quelque chose de nouveau. Cette symphonie trouve sa source dans une commande de Paganini qui était détenteur d'un Stradivarius. Berlioz, ayant vécu en Italie après son prix de Rome y trouvera une source d'inspiration afin de faire voyager son Harold. Encore un exemple de musique à programme. En revanche, l'alto n'est pas mis en avant, de sorte que Paganini ne jouera jamais cette œuvre ! Il s'agit d'une musique très narrative, où l'on goûte des dialogues éloquents avec l'alto et la harpe, notamment, dans le premier mouvement intitulé Harold aux montagnes, scènes de mélancolie, de bonheur et de joie. L'orchestre est constamment en équilibre et présente cette promenade avec sérénité. Le deuxième mouvement, intitulé Marche de pèlerins chantant la prière du soir, étonne par son ton répétitif. Bien que léger, il finit par être une peu inquiétant. Nicolas Bône  à l'alto est quant à lui constamment clair et expressif. L'inquiétude laisse place à la joie dans la Sérénade d’un montagnard des Abruzzes à sa maîtresse. Dans ce qui ressemble un peu à une musique de taverne au début avec un rythme ternaire, devient peu à peu une parade amoureuse avec l'usage du picolo chantant. Le cor anglais quant à lui apporte de la gravité dans ce passage pastoral où les timbres cohabitent de façon remarquable dans une belle clarté d'ensemble. Le final intitulé Orgie de brigands. Souvenirs des scènes précédentes, fait enfin intervenir au premier plan les cuivres et les percussions (présents en nombre) au premier plan dans une véritable fanfare. Du rythme, du rebond, avec une petite ambiance de cirque. Le terme d'orgie n'est pas galvaudé tant il y a d'intensité et de plaisir, notamment dans la récapitulation des scènes précédentes qu'on se plait à retrouver. De quoi finir sur une note positive avant de retourner à ses soucis.

Concert disponible à l'écoute pendant un mois sur France Musique

Johannes Brahms
Symphonie n°3

Hector Berlioz
Harold en Italie

Nicolas Bône alto

Orchestre National de France
Emmanuel Krivine direction

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