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Publié par andika

En addicto est un drôle d'objet théâtral. Seul en scène en « polyphonie solo », il permet de retracer l'expérience du comédien et metteur en scène Thomas Quillardet, qui a été en résidence, pendant six mois, dans un service d'addictologie d'un hôpital. Ce spectacle opère une synthèse saisissante entre d'une part, l'état actuel de notre hôpital public, les personnes en prise avec l'addiction et enfin, ce que peut apporter le théâtre dans un cadre thérapeutique. Et plus largement, ce que peut apporter le théâtre à la société.

Lorsqu'on se présente au théâtre de l'Aquarium, à la Cartoucherie du bois de Vincennes en ce vendredi 8 mars 2024, on ne sait pas trop à quoi s'attendre. Et cela ne s'arrange pas lorsqu'on voit un homme seul, sur la scène, et les lumières allumées.

Il s'agit Thomas Quillardet, qui lorsqu'il prend la parole, demande qu'on ferme une porte. Puis semble s'adresser au public. On met bien une minute à comprendre que en réalité, il interprète plusieurs personnages. Les lumières allumées font partie de la mise en scène. Et au bout de quelques répliques du comédien, on entre dans le rythme, et on commence à discerner les différents personnages, au rythme des anecdotes qui sont racontées. Tantôt l'histoire d'un directeur d'établissement scolaire catholique qui se soigne pour garder son emploi après avoir tapé dans la caisse. Ou cette mère célibataire qui veut absolument guérir son addiction afin de récupérer la garde de ses enfants. Ce qui frappe, c'est la fluidité avec laquelle ces différents récits s'enchaînent, s'entremêlent et coulent de source. Et là où l'entreprise est une réussite, c'est que le comédien prend aussi parfois le rôle des soignants, afin de donner un contrepoint, et de permettre d'embrasser le sujet sous toutes ses formes.

Avec une économie de moyens dans la mise en scène, une chaise sur le plateau, un comédien assis la plupart du temps, mais simulant à lui seul un cercle de parole, on se sent concerné et presque témoins de la thérapie de groupe. La lumière de la salle s'éteint enfin au bout d'un moment. De plus, chaque récit conté respire l'authenticité. Que ce soit du côté des patients, ou des soignants qui déplorent l'état de l'hôpital public, où le personnel travaille parfois dans des conditions difficiles. Et où il n'est pas toujours aisé de préserver ce qui fonctionne.

Enfin, le thème de l'addiction nous parle à chacun. Même si on n'en est pas victime directement, on connait tous des personnes qui ont pu avoir un problème avec l'alcool ou des produits stupéfiants. On a tous connu des personnes qu'on ne pouvait pas aider et on les a regardées s'enfoncer inexorablement. Et parfois, on peut aussi craindre soi-même de tomber dans ce genre de travers. En addicto permet d'appréhender la question avec doigté, et de nous rappeler qu'il s'agit avant tout d'une maladie. La pièce permet également d'appréhender le fonctionnement d'un service de soin d'un point de vue très accessible. Et en 2024, quatre ans après le Covid, l'hôpital public est plus que jamais un sujet de préoccupation de la société française. Et il est normal que le théâtre s'en empare. En voyant le travail de Thomas Quillardet, on se dit qu'il n'aurait pas pu le faire de plus belle manière.

En addicto, représentation du 8 mars 2024 au théâtre de l'Aquarium

Texte et interpretation : Thomas Quillardet
Collaboration artistique : Jeanne Candel
Dramaturgie : Guillaume Poix
Lumières / régie générale : Milan Denis
Collaborateur.trice.s : Titiane Barthel (en cours)

Production : 8 AVRIL
Coproductions : Festival d’Automne à Paris ; Théâtre de la Ville ; Le Trident – Scène nationale de Cherbourg-en-Cotentin ; La Rose des Vents Scène nationale Lille Métropole à Villeneuve-d’Ascq
Avec le soutien en résidences de création de Théâtre Ouvert - Centre national des dramaturgies contemporaines ; Théâtre Jacques Carat de Cachan ; la vie brève - Théâtre de l’Aquarium et L’azimut – Antony/Châtenay-Malabry

 

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