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Publié par andika

Samedi 21 décembre 2019 avait lieu à la maison de la radio le concert de Noël de l'Orchestre Philharmonique de Radio France. Pour cette occasion, les fonds récoltés étaient reversés à l'UNICEF, ONG dont l'orchestre est ambassadeur.

Pour cette édition, le thème choisi était le tango. Bien entendu, la tango argentin des faubourg de Bueno Aires, mais aussi, le moins connu tango finlandais. Même s'il fait parfois froid dans ce pays, il n'en demeure pas moins que sa production en tango est assez impressionnante. Ce que Mikko Franck, directeur musical de l'orchestre et finlandais de nationalité, se fera un plaisir de nous faire découvrir.

Orchestre Philharmonique de Radio France et Mikko Franc le 21 décembre 2019 à l'auditorium de Radio France

Orchestre Philharmonique de Radio France et Mikko Franc le 21 décembre 2019 à l'auditorium de Radio France

En prélude, une pièce courte intitulée Quejas de bandoneon (Plaintes de bandonéon) composée par l'argentin Juan De Dios Filiberto. Prévue initialement pour le piano, les Quejas ont finalement échu à cet instrument emblématique. Le bandonéon est pourtant d'origine allemande mais il est le fier représentant et vecteur du tango argentin.  Le soliste Juanjo Mosalini nous plonge immédiatement dans l'ambiance du tango, mi tragique, mi sensuelle avec une véritable lamentation d'une grande beauté, et un jeu impressionnant avec les doigts. Un aller simple pour Bueno Aires.

Mais c'est à ce moment que la réalité se rappelle à notre bon souvenir et que du monde arrive sur scène. L'orchestre se lève alors et lit un texte adressé au public et à la PDG de Radio France présente dans la salle, Sibyle Veil. Une grève frappe radio France depuis près d'un mois suite à l'annonce de la suppression de 299 postes, dont des postes dans le Choeur de Radio France. Les musiciens ont alors rappelé leur attachement à toutes les formations de la maison et le besoin vital de protéger ces ressources afin de continuer à produire des contenus de qualité. Ils ont rappelé leur attachement à leur mission de service public, notamment pour l'éducation populaire à travers la musique. S'est est alors suivi une ovation du public. Depuis le début de la grève, de nombreux concerts ont été annulés, les grilles des différentes stations sont affectées et on se rend alors compte à quel point ce que produit Radio France est vitale. Chacun devrait se sentir concerné par la question.

Le tango a repris ses droits par la suite avec un de ses compositeurs les plus illustres. Astor Piazzolla. Juanjo Mosalini étant toujours au bandonéon mais accompagné cette fois-ci par un Philhar' des grands soirs ! Tout d'abord dans Adios Nonino, composé par  Piazzolla en hommage à son père qui était mort. Après un premier thème assez vigoureux, le second thème laisse apparaître toute la nostalgie inhérente à cette pièce. Une orchestration magnifique fait s'exprimer chacun des pupitres de l'orchestre, on apprécie particulièrement les cordes qui malgré le lyrisme du thème, conservent de la retenue. Le bandonéon n'étant jamais noyé, et délivrant la mélodie avec une grande sensibilité. La Milonga Del Angel persévère par la suite dans l'excellence. Des équilibres parfaits trouvés par Mikko Franck, avec notamment l'usage de la harpe, des cordes en pizzicato. Un moment de tristesse et d'émotion, un voyage au rythme de la milonga, plein de sensualité. Un temps particulier, un rythme hors du monde, la mélancolie du tango et sa beauté. Une ineffable douceur qu'on ne ressent qu'en se plongeant dans cette musique.

Après le Tango nuevo (nouveau tango) de Pizzolla, place au moins célèbre Tango finlandais avec la chanteuse Maria Ylipää. Son apparition sur la scène est comme une étoile venant éclairer la soirée. Pleine d'humour, elle salue par exemple un retardataire qui essayait d'entrer discrètement. Mais surtout, à l'aide de son micro, elle ne fait pas que chanter. Elle explique également au public la teneur des paroles qu'elle déclame. Il est vrai que le finlandais peut être difficilement intelligible pour le public parisien ! Deux types de tangos selon elle. Celui qui raconte pourquoi une personne en aime une autre. Et celui qui raconte pourquoi une personne n'en aime pas une autre ! Le premier tango chanté est Kangastus de Unto Mononen  que l'on peut traduire par mirage. Très dansant et rythmé, il permet d'entendre tout le charme dans la voix de Maria Ylipää, qui échange de nombreux regards complices avec le chef afin de d'être en accord avec l'orchestre qui l'accompagne fidèlement. Le deuxième tango s'intitule Tähdet meren ylläv (Étoiles de la mer), toujours du même compositeur. Il figure l'étoile permettant de guider un bateau afin de rejoindre par la mer son amour sur une île. On apprécie ici le violon d'Hélène Collerette qui accompagne magnifiquement la chanteuse. Le troisième tango s'intitule Muista minua (Souvenez-vous de moi). Nous le devons à Toivo Kärki. Le chef chante en même temps que la chanteuse, on apprécie également l'emploi des bois, plus précisément les solos de la flûte de Magali Mosnier, ainsi que les solos de clarinette. Le dernier tango, Meren Rannalla (Front de mer), de Unto Mononen, évoque quant à lui le désespoir après une rupture. Etat d'esprit que nous ressentons au départ de cette fabuleuse chanteuse de la scène tant nous aurions aimé en avoir davantage !

Après l'entracte, voici la création française Tango manos, concerto pour piano et orchestre composé par Aaron Zigman suite à une commande de Radio France. Jean-Yves Thibaudet rejoint le Philhar' pour l'occasion pour assurer la partie soliste au piano. Cette œuvre parvient à opérer la fusion entre la forme du concerto classique et l'authenticité du tango de Bueno Aires. Avec un premier mouvement tout d'abord mélancolique, lent pour devenir par la suite sautillant. Avec le même thème, la musique exprime des choses différentes. Le soliste est engagé et croit en cette musique, cela passe notamment par son attitude corporelle, où on le voit bouger et vivre intensément son interprétation. Le deuxième mouvement noté Adagio affettuoso – Allegretto est un moment d'apaisement avent que l'intensité rageuse du final, avec un déluge de percussions, ne donne envie aux personnes présentes dans le public de se lever et danser ! Beaucoup de violence et du virtuosité dans ce final, pour ce merveilleux concerto qui honore aussi bien le tango que cette forme du concerto loin d'être éculée.

Pour la dernière œuvre au programme, le Danzón n°2 d'Arturo Márquez, Mikko Franck revient sur scène en portant un T-Shirt de l'UNICEF. Une belle façon de ponctuer la soirée. Le Danzón est né à Cuba à la fin de 19ème siècle avant de se populariser au Mexique. Comme le tango, il s'agit d'une danse assez sensuelle. Une œuvre permettant à chaque pupitre de l'orchestre de s'illustrer tant l'orchestration les met en valeur. On apprécie également de très beaux tuttis. Rien de tel pour se quitter très bons amis pour les fêtes de fin d'année.

Programme du concert du 21 décembre 2019
Juan De Dios Filiberto
Tango pour bandonéon solo 

Astor Piazzolla 
Adios Nonino - Milonga del angel

Quatre tangos finlandais
Unto Mononen : Kangastus (arr. Riku Niemi)
Unto Mononen : Tähdet meren yllä (arr. Alakotila-Kuusisto-Nyman) 
Toivo Kärki : Muista minua (arr. Jarkko Riihimäki)
Unto Mononen : Meren rannalla (arr. Riku Niemi)

Aaron Zigman
Tango Concerto pour piano et orchestre
(co-commande de Radio France / Festival de musique de Pékin / San Francisco Symphony - création française)

Arturo Márquez
Danzon n°2

Jean-Yves Thibaudet piano
Juanjo Mosalini bandonéon
Maria Ylipää chant

Orchestre Philharmonique de Radio France
Mikko Franck direction

 

Texte de l'Orchestre Philharmonique de Radio France lu lors du concert

Programme du concert

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