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Publié par andika

Cinq ans d'âge est une pièce de théâtre du Dr Jean-Pierre Klein. Car en effet, en plus d'être dramaturge, cet homme est également un médecin psychiatre. Ce qui l'a conduit à fonder l'Inecat (Institut national d'expression, de création, d'art et transformation), et le concept d'art-thérapie

De thérapie, il en est un peu question dans cette pièce. Elle se déroule dans le cabinet... Du juge pour enfant ! Le jeune Damien, 17 ans, comparait devant le juge pour un délit qu'il a commis, et il est sommé par ce dernier de s'expliquer. Damien s'exécute alors et remonte jusqu'à une période fondatrice de son existence, lorsqu'il avait l'âge de cinq ans.

Tout au long de la pièce, l'action va osciller entre le présent dans le cabinet du juge, et le passé dans les souvenirs d'enfance de Damien avec sa mère. Les choix de mise en scène rendent ces changements d'époques très fluides. Sur le plateau, l'éclairage change, et Damien n'a plus qu'à se déplacer vers l'époque de l'action, sans que cela n'entraine la moindre difficulté de compréhension. Remi Goutalier, le comédien interprétant Damien, bien que plus âgé que son personnage, parvient à en livrer toutes les émotions, notamment par un travail judicieux sur sa voix, qui fait vraiment entendre tantôt un enfant de cinq ans, tantôt un adolescent.

Lors des flash-backs, on découvre alors la triste histoire de Damien. Il vit avec sa mère Édith dans un foyer monoparental, pour la simple et bonne raison que son père, est marié à une autre femme, et qu'Édith est sa maîtresse. L'absence du père étant caractérisée par un interphone, ou un téléphone. On ne peut communiquer avec lui qu'à travers une machine. Et pour résumer les choses, Édith à une réplique très percutante pour son fils "Ton père, c’est une voix et des couilles !"

Les dialogues sont crus, pour ne pas dire cruels, tant rien n'est épargné à ce petit garçon, qui se retrouve immergé bien trop profondément dans un monde d'adultes qu'il ne sait pas appréhender. Souvent traité comme un objet, il ne fait que subir les conséquences des choix des adultes censés le protéger. Ainsi, lorsqu'il est amené à consulter un psychologue, il n'en est que plus traumatisé par un jargon tout droit de Françoise Dolto et de Lacan.

Jeunesse entravée par les problèmes amoureux d'une mère. Insouciance empêchée par le comportement indigne de celle qui devrait être une protectrice pour son enfant. Mais on sent également tout le désarroi, la tristesse et la solitude de cette femme à travers l'interprétation de Lætitia Richard. Engagée dans une relation plus de passion que de raison avec le père de Damien, elle a un mal fou à s'en libérer. Car oui, ces personnages vivent avec des chaînes, notamment Damien qui comparait menotté dans le cabinet du juge. Ces menottes étant toujours là dans les séquences souvenirs, elles en troublent le déroulement. Souvent, les troubles de nature psychologique remontent à l’enfance, il est intéressant alors de voir le terreaux du traumatisme de Damien.

Pièce sans concession sur notre temps, ses travers mais aussi ses réalités, on n'en sort pas indifférent. Un humour noir manié de façon très habile qui permet de faire passer certains messages. Notamment une critique assez malicieuse de la psychanalyse. Une mise en scène remarquable qui avec des moyens très simples, sert le texte avec avec beaucoup d'acuité. Enfin, des comédiens totalement engagés dans leurs rôles respectifs. Regis Romele, cumulant trois rôles, (policier, psy et hilarant libertin), et Patrick Courtois, en juge humain et inflexible. Une pièce à voir. Définitivement.

Auteur : Jean-Pierre KLEIN

Mise en scène : Michel Laliberté, assisté d'Agathe Quelquejay

Avec : Laetitia Richard, Regis Romele, Patrick Courtois et Remi Goutalier.

Tous les jeudi, vendredi et samedi du 4 avril au 18 mai 2019 au Théâtre Essaïon

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