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Publié par andika

Une fois de plus, la vie succède à l'horreur, ce concert était dédié aux victimes de Manchester. Sachant que Daniel Harding, le chef, est britannique et de surcroît supporter de Manchester United. Malgré la menace terroriste, il faut continuer à vivre comme l'a rappelé la maire de Paris, Anne Hidalgo.

Mercredi 24 mai 2017 avait lieu un concert à la philharmonie de Paris où l'unique œuvre au programme était la symphonie n°2 "Résurrection" de Gustave Mahler, interprétée par l'orchestre de Paris et son choeur dirigés par Daniel Harding. J'en garde une impression mitigée. Je vais m'en expliquer. J'attendais beaucoup de ce concert, sans doute trop. J'ai écouté cette œuvre à de nombreuses reprises, j'avais même assisté avec attention à l'enregistrement de la tribune des critiques de disques à son sujet récemment.

Je suis attaché à cette symphonie car c'est avec cette dernière que j'ai vraiment découvert Mahler. Enfin, avec la Totenfeier qui est un poème symphonique mais également le premier mouvement de cette symphonie. Et c'est à partir de là que les problèmes commencent. Trémolo des premiers violons, thème grinçant joué par les violoncelles, tonalité de do mineur bien installée, tempo vif. Ça commence très bien mais l'effet de surprise s'estompe vite. C'est le deuxième Totenfeier auquel j'assiste et ça me marque d'emblée moins que la première fois. Je trouve l'orchestre un peu distant, le fondu a du mal à se faire, je sens déjà poindre des problèmes sur certains pupitres d'instruments, notamment les bois. Toutefois, les contrastes et les dynamiques maintiennent l'ensemble et la lecture analytique de la partition de Daniel Harding permet de mettre en valeur l'orchestration. On sent les seconds violons en forme et ce ne sera jamais démenti. Et les percussions sont déjà là, brillantes, fondamentales, inestimables, indispensables, inoubliables. À la fin du premier mouvement, on est totalement entré et c'est à ce moment qu'il se passe une chose qui va nous faire sortir du concert. Mahler exige une pause après le premier mouvement tellement l'ambiance de cette marche funèbre diffère de l'Adante qui suit. On nous avait prévenu avant le début qu'il y aurait un moment de silence à la fin de ce mouvement. Les lumières ont été éteintes, l'orchestre est resté sur la scène pendant de longues minutes de recueillement puis la lumière a été allumée et les musiciens se sont de nouveau accordés. Si dans l'esprit, la volonté du compositeur a été respectée, dans les faits, on est sorti du concert. Soit on fait un vrai entracte soit on ne fait rien, cet entre deux a longuement gâté la suite de l'interprétation.

Arrive maintenant le deuxième mouvement. L'orchestre ne s'est pas remis dedans, le son est un peu lointain, encore un problème de fondu, l'émotion a du mal à monter. C'est difficile de se remettre dedans après la pause d'autant plus que les percussions sont moins sollicitées ici. Heureusement, les violoncelles et les contrebasses permettent de ne pas tomber dans la léthargie.
Le Scherzo est enchaîné assez rapidement avec deux coups de timbales assez brusques puis vient la grande déception de la soirée. La partie du hautbois qui est si importante à mon goût n'est pas à la hauteur, problème de timbre sans doute. L'ironie de Mahler est totalement absente. L'orchestre est trop sérieux, trop sage, trop bien organisé alors que justement, Mahler nous conte ici un monde désorganisé, ridicule, qui n'a pas de sens. L'orchestre semble trop bien jouer, chaque pupitre prenant la parole bien sagement sans déborder des cases. Le hautbois et le cor anglais, les clarinettes et bassons étant décidément trop neutres. Heureusement que les percussions sont là et maintiennent l'ensemble. Mais ce Scherzo n'était qu'un petit mauvais moment à passer, car à partir du 4ème mouvement, Urlicht, on est définitivement emporté.

En effet, l'entrée de la voix humaine change tout. L'alto Wiebke Lehmkuhl permet à l'ensemble de revenir sur les bons rails, l'émotion est enfin au rendez-vous. La partie instrumentale qui suit cette intervention est juste parfaite. C'est le passage le plus intéressant d'un point de vu purement musical pour un concert. Dynamiques changeantes, crescendos, percussions assourdissantes, contrastes. L'orchestre est manié avec dextérité par Daniel Harding pour notre plus grand plaisir, les solistes s'illustrent, notamment Vincent Lucas à la flûte et Roland Daugareil au violon. L'arrivée de la Soprano Christiane Karg se fait naturellement même si elle est un peu en retrait par rapport à sa collègue.

Et c'est déjà le moment du chœur, qui fait son apparition sur le mot Auferstehen (ressusciter), sur un pianissimo à faire fondre, à capella, assis. Les doutes du début s'estompent et on avance sereinement vers la résurrection finale. L'entrée tonitruante de l'orgue met tout le monde d'accord et permet d'aboutir à un véritable triomphe à l'aide du chœur enfin debout. Cet orgue domine tout l'orchestre, toutes les voix et permet une résolution emplie de grandeur qui apporte un vrai soulagement à toutes les problématiques qui ont pu être rencontrées. 

En conclusion, cette symphonie est tellement démesurée qu'elle est difficile à appréhender en un seul concert. L'écoute répétée d'une seule version en disque peut en troubler la réception en concert. Et à contrario, les parties que j'aime le moins et que par conséquent, j'écoute moins en disque sont celles qui m'ont le plus convaincu lors du concert. Entendre ces percussions en vrai, un simple triangle se démarquer, un xylophone se faire entendre, c'était vraiment inestimable. Pour avoir davantage d'informations sur cette œuvre, ça se passe iciIci et Ici.

Et je ne résiste pas à une petite revue de tweets concernant ce concert.

Edit: D'autres avis sur le concert ici, ici et ici.

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G
Poussée à l'extrême, érigée -comme jeudi 25- comme principe unique de son interprétation, la direction analytique (uniquement analytique) de Daniel Harding rend méconnaissable la "Résurrection". Pas de fil conducteur, pas la moindre émotion. Ce qui paraît inimaginable ici. Certes, quelques passages instrumentaux valent. Mais quelques passages seulement : la partition est devenue une boîte de pièces détachées.
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A
Voici le lien du fameux compte rendu, j'avais oublié ! https://bachtrack.com/fr_FR/critique-daniel-harding-karg-lehmkuhl-orchestre-de-paris-philharmonie-mai-2017
A
Je vous rejoins totalement. J'ai été moins déçu à partir de Urlicht mais ce que j'attendais au tournant, c'était bien le scherzo. J'attire votre attention sur ce compte rendu que j'ai trouvé particulièrement avisé et qui exprime les soucis de cette interprétation mieux que mois. Au plaisir de vous lire.