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Publié par andika

Le début de la saison 20/21 à Radio France se fait sous le signe de la musique française. Il est vrai qu’en ces temps de pandémie, nous retrouvons les vertus du localisme. Les déplacements sont plus difficiles, de sorte que le chef initialement prévu, Edward Gardner, a été remplacé par le directeur musical de l’Orchestre Philharmonique de Radio France pour son concert du samedi 3 octobre 2020. Et pourtant, en faisant avec ce que l’on a à proximité, on ne perd pas en qualité. C’est ainsi que la pianiste français, Bertrand Chamayou, était invité afin de jouer, entre autres, les deux concertos pour piano de Ravel. Pour notre soirée, le second concert du 3 octobre, il s’agissait du Concerto en sol. En outre, ce dernier a interprété des préludes de Debussy. Le Philhar’ gardant pour lui Crescent Scratches pour quatuor à cordes à cordes de Yann Robin et la Suite Ma Mère l’Oye de de Ravel.

 

Le Quatuor à cordes n°2 de Yann Robin se base sur la pratique des scratches chère au disques jockey. Et paradoxalement, ce procédé fonctionne bien avec l’archet, même si ce dernier en ressort en assez mauvais état. Mais cette musique ne se résume pas qu’à cela, tant son rythme est intense. On observe d’ailleurs les musiciens taper du pied. Un vrai bourdonnement jalonne cette interprétation intense, saluée par le public. Le compositeur rejoignant les musiciens sur scène à l’issue de l’exécution.

Place maintenant à Bertrand Chamayou, seul devant son Steinway pour interpréter les préludes de Debussy. On sent un grand soin apporté aux nuances et à la clarté du discours musical. Mais aussi une grande sobriété dans l’interprétation, malgré les nombreux passages d’une virtuosité étourdissante, et d’une difficulté technique redoutable. A ce titre, on admire la qualité de la main gauche dans La cathédrale engloutie, la clarté du phrasé dans La Terrasse des audiences du clair de lune, et la précision des attaques dans Feux d’artifices qui porte drôlement bien son nom !

L'intérêt de ce concert était de présenter une version révisée du Concerto en sol de Ravel. En effet, les éditions qui circulaient jusqu'à présent comportaient des fautes. Bertrand Chamayou en avait d'ailleurs repéré d'assez évidentes dans le texte du Concerto pour la main gauche. Et maintenant que les manuscrits de Ravel sont accessibles, il est possible d'avoir enfin le bon texte. Mais pas de crainte, on en ressent toujours toutes les influences, notamment celle du jazz, pour cette partition de 1932 qui n'a pas pris une seule ride, bien au contraire ! De structure classique en trois mouvements, le Concerto en sol fait pourtant penser à tout sauf de la musique classique. Le Philhar' est pétillant dans l'Allegramento initial. Mikko Franck a toutefois un peu de mal à tempérer l'enthousiasme de son orchestre, ce qui occasionne ça et là des petits problèmes d'équilibre. Cependant, le jeu virtuose et expressif de Chamayou gomme bien rapidement ces petits désagréments. L'orchestre gagnant de son côté en couleurs, avec ces teintes jazzy aux cuivres, et surtout cette harpe solo dont on se délecte. L'équilibre qui faisait défaut au premier mouvement est maintenant présent dans l'Adagio assai. Une clarté du son merveilleuse, notamment avec le divin solo de flûte de Magali Mosnier. Une écoute mutuelle de tous les instants, dans ce moment de douceur et d'harmonie. Le final quant à lui est marqué par les attaques gourmandes de Bertrand Chamayou et les réponses tout aussi enthousiastes de Mikko Franck et de son orchestre. Enthousiasme toutefois un peu trop sobre pour ce final festif. Néanmoins, quelle musique pétillante et quelle maîtrise de tous ces musiciens. Une ovation bien méritée s'en est donc tout naturellement suivie avant que le pianiste ne revienne interpréter Pavane pour une infante défunte du même Ravel en bis.

Et toujours Ravel pour conclure avec Ma Mère l’Oye. Initialement une suite pour piano à quatre mains, Ravel va l'orchestrer et y faire parler toute sa science dans cet art. Et quelle orchestration ! Une partition faite pour mettre en valeur l'orchestre dans toute sa splendeur et Mikko Franck ne s'y trompe pas en faisant sonner son Philhar' comme jamais. Une clarté de tous les instants, un équilibre des plans sonores révélant toutes les beautés de la musique, et saluons ici les cordes notamment dans Les Entretiens de la Belle et de la Bête. Et plus particulièrement le solo de violon de Ji-Yoon Park dans Le jardin féérique. Car effectivement, en entendant cela, on se dit que la vie est un conte de fée. Même dans ce contexte particulier. Encore un beau concert au service de la musique française à Radio France.

Programme du concert du 3 octobre 2020
YANN ROBIN
Quatuor à cordes n°2 "Crescent Scratches"

CLAUDE DEBUSSY
Trois préludes : La Cathédrale engloutie – La Terrasse des audiences du clair de lune – Feux d’artifices

MAURICE RAVEL
Concerto pour piano en sol majeur

MAURICE RAVEL
Ma Mère l’Oye (suite)

BERTRAND CHAMAYOU piano
EUN JO LEE violon
LOUISE GRINDEL violon
MARC DESMONS alto
NICOLAS SAINT-YVES violoncelle
ORCHESTRE PHILHARMONIQUE DE RADIO FRANCE
MIKKO FRANCK 
direction

 

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